« Litran n’a qu’un objectif, le 21mm, pour des photos originales. Prenez-en de la graine. » (Roger Thérond)
« Un obsédé de la perfection technique ». (Jean-Marie Périer)
Sa composition picturale est proche de celle des peintres.
En 1966, soit cinquante ans après la bataille de Verdun, qui, avec ses milliers de morts, reste un des désastres de la Grande Guerre, Manuel Litran part en arpenter ses » champs d’honneur » pour le compte de Paris Match en compagnie de François Luizet. Des fils de fer barbelés délimitent une zone interdite pour cause de danger de mort. Bravant l’interdiction, le tandem s’aventure sur des terres abandonnées, où la végétation peine à repousser. La guerre est partout présente : trous d’obus, tranchées remplies d’eau de pluie, bidons, fusils, casques allemands et français, autant de débris oubliés, et que la terre n’a pas engloutis. Manuel Litran photographie ces traces, sans chercher à identifier précisément des lieux, qui offrent le même sentiment de désolation et de mort. De cet itinéraire, le photographe n’a conservé qu’une ligne tracée sur une carte d’état major au 1/25 000e. Le trajet, qui suit différents chemins autour du fort de Douaumont, passe par des villages détruits en 1916 et jamais reconstruits : Louvement-Côte-du-Poivre, Beaumont-en-Verdunois, Ornes, Bezonveaux. Les arbres plantés à la fin des années 1920 ont aujourd’hui fini par pousser dans cette Zone rouge, autour de vastes clairières, où les jeux, les pique-niques, la musique restent interdits et où des panneaux signalent l’emplacement de chacun des neufs villages » morts pour la France.
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